CINÉMATOGRAPHE  

et écriture


sommaire contact auteur titre année nationalité





2046 

   1966. M. Chow, célibataire, est journaliste de son métier. Parce qu'une jeune femme nommée Su Li Zhen n'a pas voulu "partir avec lui", ou du moins s'est arrangée pour en accuser le hasard des cartes à jouer, il quitte Singapour pour Hong Kong où, descendu d'abord dans un petit hôtel de Wanchai, il tient une chronique sur la vie nocturne de la cité, ce qui lui vaut une vie sexuelle mouvementée. Le jour du réveillon de Noël 66 il croise Lulu, rencontrée en 64 dans une boîte de Singapour, qui l'a oublié et a changé de nom. Lulu avait perdu l'amour de sa vie, et sur l'instigation de Chow, lui et ses copains s'étaient cotisés pour lui payer le voyage de Hong Kong. Il la raccompagne à l'Orient hôtel où elle occupe la chambre 2046 (comme celle où Chow et Su Li Zhen se retrouvaient à Singapour apprendra-t-on à la fin). Deux jours plus tard il revient pour apprendre que "Mimi" est partie. En réalité elle a été poignardée par un jaloux, batteur de son état.
   Chow voudrait habiter la chambre 2046 mais elle est en réfection. On lui propose en attendant la 2047, qu'il conservera par habitude. Jing-wen, la fille aînée de l'hôtelier Wang occupe la 2046. Elle a un petit-ami japonais dont elle apprend la langue. Ayant souffert du Japon pendant la guerre son père l'oblige à rompre. La cadette, Jie-wen, s'offre à Chow qui décline en raison de son extrême jeunesse. Elle finit néanmoins par s'enfuir avec un batteur. Survient une récession économique à la suite d'émeutes. La clientèle se raréfie.
   Cloîtré dans sa chambre, Chow écrit un roman de science fiction intitulé 2046, dont la matière faite "d'hommes et de femmes en quête d'amour et qui risquent tout pour parvenir en un certain lieu du futur en 2046", s'inspire en partie de certaines de ses expériences. Lieu, où se retrouvent les souvenirs perdus, forme futuriste du rituel du secret confié à un trou pratiqué dans un arbre qui jouait un rôle dans In the Mood for Love. Personne n'en est revenu à l'exception du narrateur et protagoniste, jeune Japonais dont la fiction, fiction dans la fiction, inaugure le film.
   La crise prenant fin, quelqu'un emménage dans la 2046, d'où filtrent force soupirs et grincements rythmés de sommier, à la grande colère de Jing-wen. Il s'agit de Bai Ling, que Chow drague avec désinvolture. Celle-ci rompt avec son petit ami Dabao, qui l'a trompée. Chow, auquel rien n'échappe, en profite pour l'inviter au réveillon de Noël 67. Elle lui fait des confidences : Dabao devait l'emmener à Singapour. A sa demande, Chow lui décrit la vie de là-bas ; elle verse des larmes.
   Sur le chapitre des femmes, il se montre cynique, déclarant à Bai Ling quant à elle la considérer seulement amie de beuverie, alors qu'elle semble secrètement désireuse d'une relation plus sérieuse. Bien qu'elle ait consenti à cette espèce de contrat d'amitié virile, ils deviennent amants. Mais il tient à la payer, pour ne pas s'attacher, en déduit-elle. Visiblement à contrecœur, essuyant une larme, elle accepte une petite somme symbolique - 10 unités, ce que le journal payait les 1000 mots - pour chaque étreinte, après quoi il regagne sa chambre. Ce qui lui donne le droit de la frustrer à l'occasion en prétextant être à court d'argent. Quand elle propose de le payer pour une nuit entière, il refuse. Bientôt elle le paye au tarif pour quelques instants de plaisir dans sa propre chambre. Bref elle l'aime, il la maltraite. Peu à peu cependant chacun retourne de son côté et la jeune femme, qui a déménagé, renoue avec Dabao.
   Une relation platonique se noue avec Wang Jing-wen, de retour dans la chambre 2046. Chow a proposé à l'insu du père Wang de servir de boîte aux lettres pour le courrier amoureux de sa voisine. Depuis six ans le Japonais l'aime toujours autant. Les lettres sont glissées d'une chambre à l'autre à travers les jointures de la cloison de bois. Cependant Chow est toujours forcé pour vivre d'écrire sur le sexe. Jing-wen lui propose de changer pour des récits d'arts martiaux, qu'ils rédigent ensemble.
   Puis Chow se lance dans un nouveau roman intitulé par fantaisie 2047, où il s'inspire de son expérience pour démêler les raisons des complications amoureuses de Jing-wen. Ce faisant il soupçonne penser davantage à lui-même qu'à l'amant de celle-ci. Il s'imagine incarné par le jeune Japonais du début à bord d'un train lancé vers 2046, amoureux d'une androïde aux réactions différées sous les traits de Jing-wen. M. Wang y joue le rôle d'un hôtelier vantant le service des jolies hôtesses androïdes, dont on ne doit pourtant jamais tomber amoureux. "Qui tomberait amoureux d'une androïde" rétorque-t-il ? "On ne sait jamais, des sentiments s'insinuent en nous à notre insu" lui est-il répondu, phrase que Chow avait déjà proférée à propos de Jing-wen. L'androïde propose au jeune homme d'être son arbre. Il lui confie un secret : "pars avec moi". Phrase déjà prononcée à l'intention de Su Li Zhen, et qu'il répète en vain à d'autres y compris, absurdement, à l'hôtelier de 2046.
   Le Japonais de 2046 en conclut que l'absence de réponse n'est pas seulement due à la réaction différée que Wang 2046 attribue à l'usure mécanique, mais à l'absence d'amour.
   Pour le réveillon de Noël de 68, Chow emmène au restaurant Jing-wen, qui prétend n'avoir plus d'espoir avec son Japonais. Il l'invite pourtant à l'appeler en longue distance aux frais du journal. Peu de temps après elle part pour le Japon munie d'une copie de 2047. Ce qui interfère avec 2046 : "J'ai réalisé que si l'androïde n'a pas répondu à la question cela n'a rien à voir avec l'usure de son mécanisme ni qu'elle ne m'aimait pas. Probablement elle en aimait un autre".
   Jing-wen en effet épouse son amour au Japon. La fin de 2047 lui paraissant trop triste elle demande à l'auteur de la refaire. Mais ayant laissé échappé la fin heureuse avec Su Li Zhen autrefois, Chow reste devant une page blanche. Lulu refait entretemps son apparition, puis Bai Ling qui a cherché à le voir à Noël 69. Chow était alors à Singapour où il n'a pas retrouvé Su Li Zhen, partie peut-être lui dit-on à Phnom Penh, mais son sosie, une joueuse de cartes à l'instar de l'autre, la main gauche gantée de noir, comme elle, et qui vient comme par hasard de Phnom Penh. Elle lui propose de l'aider à regagner aux cartes l'argent qu'il a perdu au casino et dont il a besoin pour retourner à Hong Kong. Elle y parvient. Chow veut connaître son passé. Elle sauve son secret en le jouant aux cartes. Ils se quittent à regret. Su Li Zhen verse des larmes. Mais Chow comprend qu'il ne regrette que la première Su.
   Dernière rencontre avec Bai Ling de retour de Singapour et qui veut lui rembourser son billet d'avion. Il refuse mais se laisse payer le repas. Il décline une invitation à passer la nuit ensemble. Après son départ, elle éclate en sanglots. Finalement personne n'est revenu de 2046, autrement dit le secret est à jamais perdu !




retourRetour commentaire