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Anthony MANN
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Du sang dans le désert (The Tin Star) USA VO N&B 1957 93’ ; R. Anthony Mann ; Sc. Dudley Nichols ; Ph. Loyal Griggs ; M. Elmer Bernstein ; Pr. Paramount ; Int. Henry Fonda (Morgan “Morg” Hickman), Anthony Perkins (Shérif Ben Owens), Betsy Palmer (Nona Mayfield), Michel Ray (Kip Mayfield), Neville Brand (Bart Bogardus), John McIntire (Doc' McCord), Mary Webster (Millie Parker), Peter Baldwin (Zeke McGaffey), Lee Van Cleef (Ed McGaffey).  

   Le chasseur de prime Morgan Hickman, « Morg », est fort mal accueilli dans le bourg où il réclame sa récompense en échange du cadavre du hors-la-loi qu'il a abattu. Refoulé de l’hôtel, il trouve à se loger chez la jeune veuve Nona Mayfield, mère blanche d’un garçonnet sang-mêlé appelé Kip, vivant chichement de la couture. Le shérif Parker ayant été tué dans une rixe est provisoirement remplacé par son futur gendre posthume, Ben Owens. Assez maladroit, celui-ci est sauvé par Morg des balles meurtrières de la forte tête du patelin, Bart Bogardus, qui brigue sa place. Passant outre la méfiance ambiante envers l’étranger, Ben requiert de celui-ci quelques leçons. Il ne quitte plus son mentor, d'autant moins quand il apprend qu'il fut autrefois shérif. Morg confie à son hôtesse s'être démis à la suite de la mort de sa femme et de son fils malades, faute d’argent pour les soigner.
   Mais nouement : Bogardus rassemble les hommes pour aller pendre les meurtriers du bon docteur McCord, les frères McGaffey, des sang-mêlé, dont la tête est mise à prix. Ils se mettent en chasse, suivis de loin par l'imprudent Kip sur le cheval offert par Morg. Le shérif Ben est résolu à empêcher le lynchage afin que les coupables soient jugés. Grâce à Morg qui, accourru au secours de Kip, les a mis hors d’état de nuire, il ramène Ed et Zeke McGaffey en prison. Morg renonce à la prime en faveur de Kip, donc de sa mère. Furieux, Bogardus et sa bande assiègent la prison. Mais dénouement : encouragé par Morg, qui a fini par accepter l’étoile de shérif (d’où le titre original, si bien traduit) jusqu’ici déclinée, Ben va au devant de Bogardus, qu’il gifle, ce qui intimide les courageux justiciers qui l'entourent. Puis, la forte tête ayant tiré le premier, il l'abat. Morg repart avec un chariot où ont pris place Nona et Kip.

   Tous les bons ingrédients sont là : conflits alimentés par le racisme et culminant dans la justice expéditive, dont la résolution se confond avec la réhabilitation du héros, déchu mais initiateur du jeune shérif vainqueur de l’épreuve, et bénéficiaire du dénouement amoureux. Avec mention spéciale pour un antiracisme redondant puisque les enjeux centraux concernent des sang-mêlé, les frères McGaffey et Nona (qui a aimé un Indien) via Kip.        
   Les différentes figures de personnages composent la syntaxe définissant l’équation simple de l’intrigue. Les acteurs sont en effet puisés dans le lexique que constitue le vivier hollywoodien, sur la base d'un étiquetage rigoureux. Henri Fonda (Galerie des Bobines), héros magnifique, buriné et circonspect ; Anthony Perkins (Galerie des Bobines), apprenti héros, plein de fraîcheur timide et d’intégrité ; Betsy Palmer, brave fille vouée au foyer du veuf éploré pour qu’il puisse retrouver, outre ses habits recousus et repassés, une existence digne ; Neville Brand dont les épaisses rouflaquettes et la silhouette trapue traduisent la grossièreté de mœurs, avec Lee Van Cleef (Galerie des Bobines), dont la face de goupil affiche la malignité ; John McIntire enfin, l’éternel bon-papa (qui n’avait pourtant alors que 50 ans) sacrifié au pathos, au point que pour un peu le spectateur ruminerait dans sa barbe des condoléances.
   Tout cela bien cousu de fil de chanvre écru. Mais peu importe : sans ces ingrédients surcodés, point de western. Surtout qu'il s'agit d'un "Mann" plus sobre qu'à l’ordinaire, la musique s'abstenant au lieu de renchérir aux moments saillants, le paysage ad hoc en technicolor laissant la place à l’espace nu de l’intrigue que le cadrage dramatise en jouant sur des profondeurs et des angles appropriés au « philobatisme », c’est-à-dire à la toute-puissance sur l’espace qui caractérise foncièrement le western avec ses accessoires : grands espaces, cheval et pistolet négateurs de distance. 2/11/08 Retour
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