CINÉMATOGRAPHE 

ÉCRITURE


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Ingmar BERGMAN
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L'Attente des femmes (Kvinnors väntan) S. VO N&B 1952 91' ; R., Sc. I. Bergman ; Ph. Gunnar Fischer ; M. Erik Nordgren ; Pr. Svensk Filmindustri ; Int. Anita Björk (Rakel), Maj-Britt Nilsson (Martha), Eva Dahibeck (Karin), Gunnar Björnstrand (Frederik Lobelius), Birger Malmsten (Martin Lobelius), Jarl Kulle (Kaj), Karl-Arne Holmsten (Eugen Lobelius).


    En vacances sur une île, les trois épouses des frères Lobelius avec leurs enfants ainsi qu'une jeune fiancée attendent l'arrivée de Frederik, Paul et Martin, les aînés échappés de l'entreprise familiale en congé, et du cadet Henrik encore étudiant. Après le coucher des enfants, dans un décor intérieur chaleureux entouré d'une nature photogénique, les femmes éprouvent le besoin de se confier les unes aux autres. Trois d'entre elles, Rakel, Marta et Karin vont faire le récit d'une expérience cruciale du couple. Annette, après avoir laissé entendre qu'on n'était jamais vraiment proche dans le mariage, n'aura rien à raconter de particulier, bien qu'à travers les autres récits Paul, son mari, paraisse un personnage sage et bon. Quand à la petite Maj, préférant l'action à la méditation, elle prend entre-temps la décision de s'enfuir avec Henrik qui se révolte contre les ukases familiaux concernant son avenir.

   Sans rien laisser dans l'ombre de ce que la moralité publique réprouve, le scénariste et réalisateur entend ainsi faire droit à la complexité et aux contradictions de la vie affective en montrant que les dysfonctionnements du couple sont structurels. Rakel explique qu'au lieu des graves conséquences qui s'annonçaient, un adultaire avec un ami d'enfance a consolidé le lien conjugal. Après avoir voulu assumer seule le fruit d'une idylle à Paris avec Martin, Marta l'a épousé par amour. Karin casse la raideur morale de Frederik en alléguant un amant pour lui faire avouer ses infidélités. Puis bloqués dans un ascenseur, ils redécouvrent leur sexualité. Enfin, grâce à Paul le sage, la fugue d'Henrik et de Maj est dédramatisée.
   Mais si l'étude humaine est parfaite en soi, elle est assez mal servie par un savoir-faire cinématographique signalétique. Les idées esthétiques trop recherchées pour elles-mêmes nuisent au jeu de l'ensemble. D'autant que le registre des récits varie du drame au burlesque. Le beau coucher de soleil qui se confond avec un fondu au
noir, les jeux de lumière sur l'eau, les effets de miroir pour dramatiser la situation adultaire, la série des vues du Paris pittoresque de l'idylle, le flou à travers le verre déformant pour faire peur en contrechamp du regard luisant faiblement à contre-jour, les plongées obliques sur Marta solitaire se dirigeant vers la clinique dont est soulignée la glaciale technicité, la statue de Vénus accueillant les époux au sortir de l'ascenseur licencieux, l'abus marqué des transitions enchaînées, etc. Aucun de ces effets n'est l'élément d'un système rigoureux qui imprimerait au film son régime profond. Seul l'érotisme sauve peut-être le film de la fabrication esthétique, surtout la montée du désir chez Rakel, intensément associée à la forte présence de la nature alentour.
   Moralité déjà maintes fois vérifiée : scénario profond et excellent photographe ne sont nullement une garantie de valeur artistique
(1). 10/11/04 Retour titres