CINÉMATOGRAPHE 

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Yamina BENGUIGUI
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Inch'Allah dimanche Fr. VO 2001 98' ; R., Sc. Y. Benguigui ; Ph. Antoine Roch ; Mont. Nadia Ben Rachid ; Pr. Philippe Dupuis-Mendel ; Int. Fejria Deliba (Zouina), Zinedine Salem (Ahmed), Mathilde Seigner (Nicole Briat), Marie-France Pisier (Mme Manant), Jalil Lespert (le chauffeur de bus), France Darry (Mme Donze), Amina Annabi (Malika Bouira).

   En 1974, le regroupement familial des immigrés du Mahgreb est institué en France. Zouina, ses trois enfants et sa belle-mère s'embarquent à Alger pour rejoindre Ahmed dans le nord de la France. Véritable déchirement pour cette expatriée, qui n'a jamais été séparée de sa mère. En France commence le calvaire. À la maison, la belle-mère fait la loi avec la bénédiction du fils qui cloître sa femme et la bat si elle désobéit. Les voisins se montrent de plus antipathiques.
   Heureusement se noue une amitié avec Nicole, autre voisine, politiquement émancipée, elle. Zouina s'évade intérieurement en écoutant le jeu des Mille francs et Ménie Grégoire à la radio, échange des sourires avec un chauffeur de bus qui passe régulièrement et, avec les enfants, elle s'échappe dans la nature en cachette quand elle le peut. La jeune femme y rencontre Mme Manant, veuve d'un officier disparu en Algérie qui la prend en affection et se met à la recherche de Malika Bouira, une Algérienne dont elle a entendu parler. Avec l'aide de 
Mme Manant, elle la retrouve. Mais Malika la chasse, choquée par ses idées avancées sur la question féminine, formées par la radio et ses amies françaises. Désespérée de perdre ce qu'elle croyait être une amie, elle se blesse à sang en brisant un carreau d'un coup de poing. Pour revenir, au lieu de monter dans le taxi affrété par Mme Manant, elle prend le bus que conduit justement le jeune homme au sourire.
   Il fait descendre ses passagers puis ramène Zouina et les enfants à la maison. Au dehors l'attendent le mari, la belle-mère, les voisins et 
Mme Manant. La belle-mère pousse des hauts-cris, réclame une punition, mais son fils pour la première fois la fait taire. Zouina sourit et annonce que dorénavant c'est elle qui conduirait les enfants à l'école.

   Cet hommage d'une femme à une femme de la génération de sa mère est exemplaire, parce qu'il offre un point de vue neuf sur la question. Celui de l'effet émancipateur, sur une Algérienne réduite en esclavage, de la rencontre entre la souffrance et les idées avancées grâce à un effet de résilience. La réaction du mari laisse supposer qu'il ne tirait lui-même aucun bénéfice des rapports de soumission, en tant que dominé par sa mère et dominant sa femme.
   L'arrivée scandaleuse de cette Maghrébine marchant librement dans la rue, la main enveloppée d'un bandage sanglant, entraîne un basculement des valeurs qui était déjà inscrit dans les ressources du personnage à en juger par le foulard imprimé aux motifs rouge-sang, expression symbolique (mais rhétorique
(1)) de la douleur préfigurant sa victoire.
   Le filmage aussi académique que possible, nullement soucieux de remodeler le langage par une exigence éthique(2) qui chercherait à se frayer une voie avec des moyens inédits, est assez mal desservi par les acteurs français, trop bons acteurs quand ils ne sont pas exécrables. En revanche on sent que les Maghrébins trouvent une certaine jouissance à contribuer au Bien porté par le projet du film. Les deux femmes surtout, Zouina et la belle-mère, dépassent leur rôle d'actrice par la puissance de leur engagement. 8/08/04
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