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Stanley KUBRICK
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Eyes Wide Shut USA VO 1999 153' ; R. S. Kubrick ; Sc. S. Kubrick, Frederic Raphael, d'après Traumnovelle d'Arthur Schnitzler ; Ph. Larry Smith ; M. Jocelyn Pook, György Ligeti, Shostakovich, Chris Isaak ; Pr. S. Kubrick ; Int. Tom Cruise (Dr William Harford), Nicole Kidman (Alice, son épouse), Sydney Pollack (Victor Ziegler).

   Le D
r William Harford, marié, père d'une ravissante fillette, amoureux de sa femme qui le lui rend bien, et titulaire d'une clientèle richissime, mène à New York une vie de rêve, jusqu'à ce qu'il se trouve embringué dans une série à la fois analogique et causale de complications érotico-funèbres constituant autant d'épreuves pour le couple, qui finira par les surmonter.
   Chacun des illustres époux, - ils le sont aussi dans la vie - est confronté à la tentation sexuelle au cours d'une soirée somptueuse chez le milliardaire Ziegler, qui est aussi le patient de William. L'hôte fabuleux fait appeler son médecin qui se laissait entraîner à l'écart par deux superbes créatures pendant qu'Alice dansait collée à un séducteur professionnel hongrois. Sommairement revêtu à la hâte dans une salle de bain, Ziegler est en compagnie d'une autre bombe à poil, inconsciente par overdose. On lui recommande la discrétion.
   Rentrés chez eux, Bill et Alice ont une conversation tendue où, au-delà de l'expression de sa jalousie, elle avoue avoir désiré naguère un homme pour lequel elle aurait tout abandonné. En état de choc, le beau docteur errant dans la ville nocturne 
est appelé sur son mobile pour la mort d'un
(riche) client dont la fille lui fait une déclaration d'amour, puis de peu manque le lit d'une prostituée.
   Dans une boîte de jazz il retrouve Nick, le pianiste de la soirée Ziegler, un ancien condisciple qui avait lâché médecine. L'artiste est attendu pour se produire à une soirée très spéciale nécessitant un mot de passe dont Bill se saisit. Ayant à quatre heures du matin loué à prix d'or le costume, la cape et le masque exigés, il se rend en taxi dans une sorte de manoir au fond des bois, abritant une messe noire où, devant un public masqué, s'offrent au tout-venant des beautés nues masquées.  L'une d'elles, qui semble le connaître, l
'ayant informé qu'il était en danger, le supplie de fuir. Mais découvert et sommé par un tribunal improvisé de livrer le deuxième mot de passe il n'est sauvé que parce qu'elle déclare endosser la faute.
   Bill est libre mais doit se taire sous peine de représailles. En restituant son costume au matin il réalise qu'il a perdu le masque, puis apprend la mort par overdose d'une ancienne reine de beauté qu'à la morgue de l'hôpital il est tenté d'enlacer. Il passe ensuite à l'hôtel de Nick, lequel a été emmené de force entre deux armoires à glace. Un peu plus tard Ziegler lui dévoile sa participation au cérémonial secret, confirmant ce dont il se doutait : que la morte et celle qui l'avait racheté étaient la même personne, et aussi que Nick a été renvoyé dans sa province pour avoir dévoilé le mot de passe.
   De retour chez la prostituée il s'entend dire par la colocataire qu'elle est à l'hôpital où l'on a diagnostiqué une séropositivité. Au milieu de la nuit il retrouve le masque dans le lit conjugal sur son propre oreiller aux côtés de sa femme endormie. Il craque et déballe tout. Pendant les courses de Noël en famille William et Alice se réconcilient, se félicitant d'avoir survécu à une aussi périlleuse aventure. Il reste une chose urgente à faire : "fuck", mot de la fin par elle
proféré.

   La mise à l'épreuve n'a duré qu'une nuit, comme un rêve prophétique où la mort frôle l'amour dans une ambiance fantastique que la valse d'accompagnement rapporte à la Vienne fin de siècle en référence à Schnitzler.
   Kubrick a voulu jouer de cette ambiguïté, mais en investissant essentiellement sur la perfection du décor et les réglages de mise en scène, il a manqué le coche. Ce que le décor traduit, c'est le luxe, souligné par des mouvements d'appareil admiratifs, comme ce travelling arrière découvrant en plongée l'immense salle richement décorée de la fête chez Ziegler.
   Tout est fait pour mettre en valeur des éléments qui, somme toute, préexistent au film, comme la valse (captée à la perfection par la Steadycam), les filles, les beaux appartements, les rues nocturnes de New York sillonnées de jaunes taxis, la préciosité néogothique du manoir rehaussée par les effets lumineux dans la nuit de vitraux bleus, l'étalage des masques, etc. Cela aussi bien au moyen de la composition très soignée de l'image dans le genre suite de tableaux, que par l'accent mis à la prise de vue sur le gigantisme des intérieurs.
   L'ambiance inquiétante relève surtout des notes aiguës frappées au piano scandant off sur un mode suspensif la lenteur calculée de l'action. D'abord alléché par le fabuleux trio du générique : Cruise (note de piano frappée), Kidman (idem), Kubrick (idem), puis étourdi de luxe-prestige-volupté, on se réveille avec la sensation d'avoir été baladé. 12/02/02 Retour
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