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Georg Wilhelm PABST
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Les Mystères d'une âme (Geheimnisse einer Seele) All. Muet N&B 1926 71' ; R. G.W. Pabst ; Sc. Colin Ross et Hans Neumann, conseillés par Karl Abraham et Hanns Sachs ; Ph. Guido Seeber, Curt Oertel, Robert Lach ; Int. Werner Krauss (Martin Fellman), Ruth Weyher (sa femme), Jack Trevor (Hans, le cousin de sa femme et son ami d'enfance), Ilka Grüning (la mère), Pawel Pawlow (Orth, le psychanalyste). 

   Des hurlements relatifs à un meurtre au rasoir dans le voisinage provoquent un faux-mouvement de Martin Fellman en train de tailler,
au rasoir, une mèche sur la nuque de sa femme. L'entaille est sans gravité. Le lendemain une lettre annonce le retour après des années d'exploration en Orient de son ami d'enfance Hans, cousin de l'épouse. Elle est accompagnée en cadeau anticipé d'une statuette de la fertilité et d'un sabre japonais qui fascine et inquiète à la fois le mari. Il fait un rêve où interviennent successivement : Hans en explorateur armé et grimaçant, qui l'abat alors qu'il s'élève dans les airs pour le fuir ; la statue de la fertilité lui faisant non de la tête ; le meurtre au rasoir dont il est témoin et pour lequel il est condamné ; vue à travers des barreaux, sa femme voguant en compagnie de Hans sur une barque et lui confiant un baigneur en celluloïde qu'elle tire de l'eau ; lui-même tentant de sabrer, phalliquement, de bas en haut, le reflet de sa femme, etc.
   Le lendemain
Martin se trouve incapable d'user du moindre objet tranchant. À son laboratoire de chimie, comme on lui transmet le message téléphonique de l'arrivée de Hans, il lâche l'éprouvette tenue dans une main. Le même accueille avec enthousiasme le visiteur chez lui. Incapable cependant de toucher aux couteaux du dîner, quittant la table en s'excusant, il se rend dans un café où il oublie la clé de sa maison. Un consommateur qui l'a rattrapé pour la lui remettre lui demande s'il éprouve une résistance à rentrer chez lui. Sa femme l'accueille tendrement. Alors qu'il lui caresse la nuque, irrésistiblement sa main se tend vers le sabre. Sur la suggestion de sa mère de se faire aider, il retrouve la trace de l'homme à la clé. Il s'agit du docteur Orth, qui le rassure et lui propose une cure psychanalytique afin de "découvrir le conflit psychologique inconscient qui a provoqué la maladie".
   En associant librement durant des mois sur des pensées formées sans intention aucune, sans rejeter ce qui paraît accessoire ou illogique et en analysant son rêve il va réaliser qu'étant en mal d'enfant il a développé une jalousie rétrospective à l'égard du cousin auquel sa femme avait confié une poupée du temps où ils étaient trois petit
s inséparables. La jalousie, renforcée par le prestige de l'explorateur, entraîne un fantasme de viol sur sa femme dont la figure est le meurtre au couteau qu'inspire l'entaille sur la nuque associée au crime voisin. Ce dénouement du conflit libère Martin de la phobie des objets tranchants qui l'avait protégée contre le meurtre. Le couple qui a maintenant un enfant peut s'épanouir.  

   Même si on peut regretter qu'aucune part, à ma connaissance, n'est réservée à la figurabilité purement verbale (qui est peut-être l'aspect le plus difficile à admettre), la démonstration est remarquable, en tout cas pour les happy few car on peut toujours rétorquer que ce n'est qu'une fiction. Mais il y a une qualité proprement filmique qui peut contribuer à ébranler les consciences les plus obtuses, ce qui accrédite le paradoxe que la vérité, justement, a toujours besoin de fiction.
   L'intérêt filmique tient à ce que le film en dit plus long que son apparence didactique, mais sans discours, selon l'économie filmique la plus stricte, impliquant une parfaite compétence du cadre et du montage, l'"épargne psychique" étant la condition d'une lecture non linéaire. Ainsi pour couper la mèche Martin passe-t-il du savon à barbe sur la nuque de sa femme. Le sabre lentement tiré du fourreau évoque une érection, figure soulignée par le reflet de lumière qui le parcourt. La terrasse est carrelée en damier et le tube à essai lâché à l'annonce de l'arrivée de Hans se brise sur un sol également en damier. La nuit du cauchemar l'orage a renversé sur ce même carrelage l'un des trois fauteuils d'osier. Au commissariat, le chef de la police quittant son bureau, un homme s'allonge sur le divan, meuble insolite en ce lieu. Lorsque l'illusion se dissipe, la chambre d'enfant que Martin croit voir entièrement meublée avec un berceau se vide en s'assombrissant, de sorte que le montant
de la fenêtre avec la traverse se détachent en croix. En sortant de cette triste chambre dans le couloir on peut voir, face à la porte, un tableau au mur représentant une montagne abrupte. On retrouve la montagne à l'épilogue lorsque Martin venant de la rivière (à associer à l'eau du rêve d'où est tiré le baigneur, symbole de fécondité) grimpe à toute allure la colline au sommet de laquelle se trouvent la maison, sa femme portant le bébé, avec une chaîne de montagne à l'horizon. Dans le rêve raconté au docteur, Hans enceint flirte avec sa femme. Par ailleurs Martin est brutal avec les chiots de celle-ci. Il est à noter que des inserts en gros plan subliment la beauté de cette femme à l'intention du spectateur à des moments caractéristiques : à l'arrivée de la lettre du visiteur et lorsque les époux vont se coucher dans des chambres séparées.
   De sorte qu'un surcroît de matériel est offert à l'interprétation du spectateur. Il peut y lire la castration par la virilisation de la femme (la mousse à raser), la dame comme enjeu d'une partie d'échec où l'un des joueurs reste sur le carreau, le désir mélancolique d'enfant, la montagne en tant qu'épreuve dont le protagoniste sort victorieux, avec la valeur sexuelle de la vigoureuse ascension, etc., à vous de voir... 30/11/17 
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